Clé 06, partie 04 : la naissance d'Hamsadéa

Poème catalytique pour la danse sacrée de l'Union Mondiale

4

LA NAISSANCE D'HAMSADEA



1

Maintenant le cri de l'Oiseau retentit très haut
Les amants l'entendent, ils craignent de perdre sa trace
Alors ils avancent, prudents
Ils cheminent le long du torrent
Sans parvenir toujours à distinguer
Entre les cimes des arbres les ailes de leur protecteur !

Amants laissez couler vos sourires, abolissez la peur
Mais sachez que pourtant peut surgir une attaque...
Et restez toujours prêts à la décourager !

Le torrent s'enfonçait dans des gorges profondes
Et parfois les parois aux manteaux de fougères
Se touchaient au-dessus de leurs têtes ...

Le sol et les buissons résonnent sous vos pas
Et des rochers dégringolent le long des pentes
Amants, soyez présents, reculez sans attendre !
Une avalanche tonne au milieu du ravin...
Pourtant n'effacez pas la paix de vos entrailles !

Et les eaux s'élançaient de cascade en cascade
Il fallait les franchir, s'accrocher aux lianes
Et jamais dans le Ciel oublier le Phénix !

2

Or en aval dansait en rugissant
Gigantesque un serpent boursouflé de venin...
Son haleine enfumait les eaux et les forêts
Tout autour les poissons et les feuilles mouraient !

Oriata suffoque et Nanihi titube
Et le monstre se rit de la frayeur de leurs corps nus
Il indique des yeux la peau de sa jeunesse
Abandonnée sur le rivage, et siffle un ordre solennel :
"Couvrez vos corps de mon image, par respect !"

Hélas la mue grotesque est bien trop lourde et vaste
Oriata et Nanihi ont du mal à s'en vêtir
Ils doivent y renoncer car elle se déchire
Et s'accroche aux buissons d'épines desséchées !

Les amoureux supplient le reptile géant
Ils ne savent comment ajuster à leurs corps
Ces haillons fragiles et glorieux
Et veulent seulement qu'on les laisse passer...
Le serpent fait entendre un plus énorme rire !

Son estomac peut-il renoncer à goûter
L'insecte qui s'est pris à son piège et supplie ?

Déjà dans la fumée ses proies si fraîches s'asphyxient
Le monstre d'un sang pur veut se désaltérer
C'est la femme qu'il veut dévorer à tout prix
C'est elle qu'il affirme aimer à la folie !
L'homme il l'épargnera s'il s'enfuit comme un singe
De branche en branche ...

Immense le serpent s'enroule autour d'un arbre qu'il arrache !

3

"Kiou !"

Les amants néammoins entendent le Phénix
Ils distinguent son vol à travers les fumées ...
Aussitôt ils oublient la mort et les menaces !

Et l'Oiseau est parti très haut vers le Soleil...
Il le frôle déjà, plonge en son coeur, y disparait
Et soudain il revient en portant dans son bec
Un miroir où tremblent des éclairs...
Il lelance aux amants traqués, terrorisés...
La fille ouvre ses mains pour le saisir !

Nanihi s'y contemple, et se trouve si belle ...
Et ses yeux s'illuminent
Comme à son front flotte un oeil de feu joyeux !

Oriata soudain pense à un stratagème
Il saisit le miroir, le tourne vers le monstre
Et celui-ci prend peur en s'entr'apercevant !

Oui, le serpent évite son image
Il frémit des reflets de sa propre laideur...
Amants, remerciez le soleil silencieux !
Oriata et Nanihi peuvent passer !



4


Or, comme ils s'éloignaient, le Phénix leur demande
D'anéantir l'animal gigantesque
Et d'atraper sa queue, de danser sur son front
Afin que plus jamais il ne dévaste
De ses malédictions la vallée bienheureuse...

5



"Voleur de vie, reptile abominable
Ainsi maintenant tu te détournes et pleures
Toi qui trônait terrible en ce passage
Et t'enlisais dans un songe sans joie ...

Lâche et traître animal, tu voulais t'attaquer
Aux amants nus, insouciants...
Mais nous savons aussi frapper
Et souffler même de la foudre !

Crache donc ton venin, et tes dents s'il le faut...
Fantôme, disparais, retrouve la mémoire
Où chantent les échos de l'Ame universelle...
Ainsi si tu le veux tu pourras boire
A souhait à l'horizon de sagesse et d'Amour !"

6

Maintenant le serpent gigantesque implore le Phénix
Il est prêt à mourir, il est prêt à renaître
Il voudrait s'évader de son malheur immense...
Ah qu'il soit donc détruit...Il s'offre en sacrifice !

L'oiseau annonce alors qu'il doit s'il veut renaître
Contempler fixement le miroir enchanté
Renoncer à l'orgueil horrible du venin...
Le soleil lancera l'éclair dont les reflets
Incendieront son corps trop longtemps égaré !

Et le serpent géant se tient prêt à brûler
Mais il ne sait comment se guérir de sa faim ...

Ses os sont tant gorgés de chaînes éblouies
Qu'il espère renaître encor trois fois...



7


"Oriata, " dit le Phénix,
"Tiens bien tendu devant toi ton miroir
Afin que le Soleil puisse le féconder
Et ce rayon d'Amour qui vient d'en haut
Fais le donc ricocher sur la Bête souffrante !"


...Alors la queue du serpent monstrueux
Prend feu en se tordant de douleur dans les flammes
Et des cendres surgit un infime lézard...

Sa tête ensuite explose et son venin jaillit :
S'avance hors du brasier une vache et ses cornes !

Enfin que la Lumière embrase tout son corps !
Et une onde rampante essaie de s'élancer
Vers les cieux ...
Et à ce souffle immortel qui tâtonne
Poussent des bras et des jambes d'enfant !

L'enfant pleura, les amants l'adoptèrent...
Il fut nommé : Hamsadéa .


8

Les amoureux longtemps longèrent le torrent
Et le torrent qui devenait rivière
Alla s'unir enfin à l'Océan...
Les ailes du Phénix survolent l'Océan...


Un crocodile qui dormait parmi les joncs
Se hâte vers le large à la poursuite d'un poisson
Qui d'un éclair s'enfuit et disparait
Il va cacher sa danse au sein des eaux profondes ...

Les crabes sur la plage à l'entrée de leurs trous
Font le guêt, suspicieux, puis lentement s'avancent...
Ils se déplacent toujours par les côtés
Ils s'affrontent parfois, se saisissent les pinces
Puis du combat se lassent, se délivrent...

La vague fait rouler sur la plage une conque
O Nanihi, prends la dans tes mains, souffles-y !


9

 Sur ce rivage enfin nous avons assemblé
Pour dresser un abri des branches et des feuilles...
Et nous avons creusé dans le sol dur des canaux
Pour irriguer quand il faudra les pieds des arbres ...


10


Nos corps sont des nuages clairs dans le matin
Et doux seront les jours de pluie sur l'océan
Légères mes caresses sur tes hanches...

Nos mains et nos regards ont tressés des signaux
Pour puiser l'énergie du ciel infatigable
Oh danse mon amour, ouvre tous tes pétales...

Il y eut des années de moissons, de cueillettes !




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